Une année 2021 marquée par des températures extrêmes

températures extrêmes en 2021

Serge Zaka (Agroclimatologue chez ITK)

47.9 degrés au Canada, 48 degrés à Verkhojansk en Sibérie, et 55 degrés en Californie, des incendies et des gels tardifs causant  « probablement la plus grande catastrophe agronomique » du siècle,  selon le Ministre de l’agriculture. Pour tous les amoureux de jardins, cette année aura été particulière. En Ardèche méridionale, où se situe Terre & Humanisme, nous avons connu  un mois de mars sans pluie et une vague de chaleur, suivis d’une descente de froid accompagnée d’un gel tardif. Puis, de violents orages sont arrivés, accompagnés parfois de 100 à 150 mm de pluie sur quelques jours, en plein mois de juin. Résultat: Le paysage est très vert pour un mois de juillet et une baisse de récolte importante se fait sentir sur les vignes et petits fruits.

Cette vague de chaleur printanière, qui a touché la France ce printemps 2021, fut suivie  d’une descente de froid particulièrement sévère et sèche. Cet évènement exceptionnel a provoqué d’importants dégâts dans les cultures viticoles et arboricoles en France, allant jusqu’à 80%, voire 100% de pertes pour certains agriculteurs français. La vague de gel de début avril 2021 est depuis 1950, date de la révolution agricole, un événement inédit par son intensité, sa surface et le nombre d’espèces concernées par le gel.

Bilan des 2 périodes de gel du mois d'avril : 98% du territoire concerné par le gel

Bilan des 2 périodes de gel du mois d’avril : 98% du territoire concerné par le gel

Cet événement massif, inédit, pourrait être plus fréquent à l’avenir (Météo France). Le dérèglement climatique provoque une hausse de la fréquence des hivers doux, rendant les plantes plus sensibles aux gels tardifs. En effet, les hivers doux provoquent un débourrement précoce (phase où une plante voit ses bourgeons éclore et devient très sensible au gel). Un bourgeon non éclos peut résister à des températures allant jusqu’à -20 degrés pour certaines espèces, mais une fois éclos, c’est différent ! Les premiers dégâts peuvent être constatés vers les -1 degrés, les futures feuilles et fruits sont donc très exposés aux risques de gel. Ce printemps, les arbres fruitiers et de vignes ont vu leurs bourgeons s’ouvrir, laissant à la merci du froid toutes les structures florales qui sont à l’origine des futurs fruits.

D’après Jeremy Cukierman, directeur d’une école de commerce liée au vin, le débourrement de la vigne se produit 15 jours plus tôt qu’il y a trente ans, et cet épisode de  gel printanier est l’un des plus importants depuis le début du nouveau millénaire. Anastasia Rocque, ingénieure à l’Institut français de la vigne et du vin ajoute : “La fréquence de ce type d’évènement a fortement augmenté”. Cerises, amandes, nectarines, mirabelles, c’est toute une filière en deuil cette année. Il faut certes panser les plaies avec des indemnisations comme le fond pour les calamités agricoles, mais il faut aussi une action étatique pour lutter contre le changement climatique, comme la promotion d’agriculture de conservation des sols (ACS) et l’Agroécologie.”

Ces vignes ont été protégées dans un cocon de glace pour résister aux des températures négatives

Ces vignes ont été protégées dans un cocon de glace pour résister aux des températures négatives

Que faire face aux risques de gel, de canicule, de sécheresse au jardin ?

Il faut prévenir le plus tôt possible les agriculteurs et jardiniers une fois que les prévisions agroclimatiques sont sûres. Pour les agriculteurs, cela laisse l’opportunité de réduire l’impact des risques avec la mise en place de systèmes de mitigation (chaufferettes dans les vignes, systèmes de ventilation ou d’aspersion pour garantir une croûte de glace protectrice autour des arbres, serre chauffée, irrigation de résilience). Néanmoins tous les agriculteurs n’ont pas les moyens pour mettre en place ces systèmes parfois coûteux.  Sur le même sujet que les moyens financiers, les effectifs et budgets de Météo France, de L’INRAE, Institut national de recherche en agronomie ont été réduits au cours de ces dernières années, (environs 800 équivalents temps plein) laissant les agriculteurs sans réel organisme agroclimatique étatique afin de leur porter de l’aide préventive face aux aléas climatiques. En France, l’agriculture est un secteur qui se transmet encore parfois par filiation (de mère en fille, de père en fils) et les connaissances liées à l’adaptation aux changements climatiques ne sont pas suffisamment démocratisées pour tous les agriculteurs, professionnels ou non.

L’agroécologie comme voie de résilience face au dérèglement climatique

L’agroécologie se présente comme moins dépendante en intrants, réduisant les besoins en eau, en carburant, en produit phytosanitaire, en privilégiant la polyculture, l’amendement avec du compost ou du fumier local.  Cette agriculture paysanne propose un modèle d’agriculture plus résilient que l’agriculture conventionnelle chimique face au dérèglement climatique.  L’agriculture de conservation des sols (ACS), met la santé du sol au coeur des intérêts, car en effet ce dernier doit être couvert tout l’année, les labours sont évités, les rotations de cultures sont plus longues que dans l’agriculture conventionnelle, ce qui va permettre de le nourrir et de stocker plus de carbone dans le sol. Les techniques de conservation du sol (techniques culturales simplifiées, hausse du taux de matière organique) protègent de l’érosion, limitent leur évapotranspiration et augmentent donc leur  résilience en cas de sécheresse.

D’après un rapport de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), l’agroécologie renforce la résilience des agroécosystèmes, en augmentant la biodiversité, la santé des sols, mais aussi offre une consolidation des aspects sociaux (partage de connaissances et valorisation de pratiques agricoles traditionnelles). Les paysannes et paysans qui cultivent en agroécologie sont aussi plus résilients car ils développent une diversité de cultures (polyculture), et de pouvoir auto-produire le fourrage pour le bétail leurs permettant de ne pas dépendre que d’un que d’un type de culture et de diversifier leur revenus. Afin de gagner en souveraineté, en résilience alimentaire et système agroalimentaire durable, il faut une agriculture qui protège les sols et  qui garantisse leur fertilité.

Dans les jardins de Terre & Humanisme, les associations de cultures sont privilégiées, offrant une diversité dans les jardins et dans l’assiette!

Se former aux pratiques agroécologiques

Afin d’en apprendre plus sur les méthodes et pratiques agroécologiques, il existe des formations, des MOOCS, des séjours d’immersion comme le WWOOFING, les formations de Terre & Humanisme ou le programme VolonTerres de Terre & Humanisme. Nous proposons aussi des stages comme :  Réussir son potager agroécologique, accueillir la biodiversité aux jardins, cheminons vers l’autonomie ou améliorer sa culture vivrière.  Merci pour votre lecture et n’oubliez pas que faire sa part ça commence aussi par changer ses habitudes alimentaires ou en commençant par un potager !

 

Sources:

https://www.youtube.com/watch?v=8nzRXxPnlPQ (Excellente vidéo sur le dérèglement climatique)

https://www.itk.fr/actualites/analyse-rapport-changement-climatique-eau-agriculture-une-vision-ouverte-et-equilibree-de-lagroecologie

https://www.agroecology-pool.org/climatechangereport/

http://www.fao.org/3/cb0486fr/cb0486fr.pdf

 

 

Pin It on Pinterest